Dix-sept stagiaires ont inauguré les 10 et 11 décembre une formation sur la « Taille et la gestion raisonnée des arbustes » conçue et animée par les Arbusticulteurs. Ils ont été accueillis à Trôo, petit village troglodytique du Val-de-Loire : cours théorique le matin par Jac Boutaud et Pascal Prieur, tous deux anciens présidents des Arbusticulteurs, travaux pratiques l’après-midi dans le jardin du gîte de La Coterie avec les jardiniers-botanistes James Garnett et Hervé Mureau.
« On ne se rend pas compte de la place que peuvent prendre les arbustes dans la gestion » entame Jac, responsable « Arbres » de la ville de Tours. C’est en effet 12 à 25 % du temps d’entretien global des espaces verts pour une surface moyenne de 6 à 7 %. Quant au volume de branches, « entre la moitié et les trois quarts proviennent des arbustes », soit pour Angers 2 à 3000 tonnes de branchages : si l’on veut diminuer le poids des rémanents et réduire le temps consacré à l’entretien des arbustes, il faut changer nos manières de tailler. C’est l’enjeu de ce stage qui rassemble des professionnels issus de services espaces verts, de centres de formations publics et privés, d’entreprises et d’agences de paysage, tous adhérents de l'association Les Arbusticulteurs.
Pascal rappelle les deux critères à prendre en compte pour une taille raisonnée – le mode de ramification et le type de floraison – et les deux hormones qui entrent en jeu : l’auxine sécrétée par les apex et les cytokinines produites dans les racines. C’est « l’hormone-chef » et la « base ouvrière », plaisante notre pédagogue.
Les deux hormones agissent à l’inverse l’une de l’autre et fonctionnent telle une « démocratie », tant que la plante n’est pas taillée. Toute taille perturbe cet équilibre hormonal, et ce d’autant plus fortement que les « chefs » sont supprimés. L’auxine limite la croissance latérale des rameaux sous-jacents et favorise la floraison et la croissance racinaire. Toute taille drastique entraîne alors un « effet cytokinines », ou « RVV » selon l’expression favorite de Pascal : « Réveil, Verticalité, Vigueur ».
Nous poursuivons sur l’architecture des végétaux ligneux, avec les notions d’acrotonie, de basitonie et de mésotonie
La notion de médiatonie, définie par Pascal, désigne « une mésotonie vigoureuse, c’est-à-dire qui fait grandir les plantes depuis le milieu de ses rameaux, comme chez le sureau ».
Il est donc primordial de comprendre d’où vient la vigueur, ce qui permet d’établir deux grandes catégories de végétaux, avec tous les intermédiaires possibles : « ceux qui grandissent » (les plantes acrotones et médiatones) et « ceux qui ne grandissent pas » (les plantes basitones et basitones à rameaux médians).
Le mode de floraison doit également guider la taille
Ce qui intéresse le jardinier ici, ce n’est pas tant la date de floraison que le type de bois sur lequel la plante fleurit. Les floraisons hivernales ou de début de printemps se forment sur les bois de l’année précédente. Le cas des floraisons estivales est moins simple. Ainsi, alors qu’elles épanouissent leurs fleurs en même temps, l’été, Hydrangea paniculata fleurit sur les pousses de l’année et Hydrangea quercifolia sur le bois de l’année précédente.
Jac Boutaud poursuit sur la démarche à suivre avant toute opération de taille : analyse du contexte, analyse de la plante elle-même (architecture, mode de floraison), choix de la forme plus ou moins architecturée.
Pragmatique, Jac plaide pour des formes mixtes, qui associent différents modes de conduite sur une même plante : « On peut avoir de l’architecturé d’un côté, pour dégager une allée, et du libre de l’autre ». La réaction de la plante à la taille sera ainsi atténuée.
La seconde matinée en salle s’amorce sur la question suivante : « basitonie ou aptitude à repercer de la souche ? »
Si les plantes basitones sont par nature aptes à repercer de souche, ce n’est pas le cas des plantes acrotones, qui doivent avoir maintenu des bourgeons vivants sur la souche. Cela explique la réponse différente de deux acrotones tels que le laurier-cerise et la lavande suite à un recépage : seule la première repartira, car elle seule possède une « aptitude à repercer de souche ».
Pascal présente ensuite les grands groupes de plantes issus du croisement entre les modes de ramification et les modes de floraison.
Différentes techniques de taille pourront être mises en œuvre en fonction du groupe. Elles se résument à des actions simples, dont le vocabulaire a été récemment clarifié par les Arbusticulteurs : la réduction (sur relais potentiel ou dominant) et la suppression de rameaux (sur charpente ou sur souche). On pourra se référer au tableau à double entrée conçu par Christine Chasseguet, croisant ces deux techniques de taille (réduction et suppression de rameaux). Sur le même principe, et agrémentée de schémas, la fiche synthétique de Marie Glory se manipule sur le terrain tel un triptyque.
Équipés de sécateurs, de coupe-branches et de scies arboricoles, les stagiaires ont eu carte blanche pour intervenir sur l’arboretum de la Coterie pendant deux après-midi hélas trop courtes en cette saison hivernale.
Un grand merci à Christine - qui a organisé et coordonné cette première session- , à nos quatre formateurs, et au propriétaire de la Coterie qui nous a ouvert son jardin et réservé un accueil attentionné, avec café et petits gâteaux servis sur le terrain, ainsi qu’une délicieuse table d’hôtes en soirée sur des tonalités créoles.
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